mercredi 16 septembre 2015

Mon avis sur "Petites scènes capitales" de Sylvie Germain


Sylvie Germain est une femme lettrée, c'est le moins que l'on puisse dire ! Après des études de philosophie et quelques voyages notamment dans les pays de l'Est, elle s'adonne à l'écriture. Ses œuvres plaisent. Pour preuve, voici trente ans, que Sylvie Germain collectionne les succès et les prix. Le Femina pour Jours de colère, le Grand prix Jean Giono pour Tobie des marais, le Goncourt des lycéens pour Magnus. Et cadeau Bonux, en 2012 elle a reçu le Grand Prix de la Société des Gens de Lettres pour l'ensemble de son œuvre. Inutile de préciser qu'avec un tel pedigree, lorsque Le Livre de Poche m'a proposée d'écrire une chronique sur un livre de mon choix parmi la sélection du mois de Septembre, sans hésitation, j'ai choisi Petites scènes capitales. J'avoue ne pas avoir regretté mon choix. 

Petites scènes capitales, c'est quarante-neuf tableaux de la vie de Lili, diminutif de Liliane, de son vrai prénom Barbara. Lili est née après guerre. C'est une petite fille ordinaire, ni belle ni laide, ni docile ni rebelle, gratifiée d'aucun don spécifique, de celles dont on n'a rien à dire de particulier que l'on remarque à peine. Si Lili est une petite fille ordinaire, sa vie est loin de l'être.  Elle est ponctuée d'épreuves et de deuils. Tout commence avec sa mère. Cette femme qui n'a ressenti aucun amour maternel lorsqu'elle l'a mise au monde, mais plutôt une répulsion maternelle et qui finalement l'a abandonnée. Comment se construire sans mère, en ignorant tout de sa génitrice, jusqu'à son visage ? Heureusement, Lili a son père. Ce père qui un jour va congédier leur solitude à deux et se remarier avec une femme flanquée de trois filles, dont des jumelles et un fils. Lili apprendra à vivre avec sa famille recomposée, s'y attachera. Tout était réuni pour que Lili soit heureuse, que ses angoisses s'apaisent, jusqu'au jour où l'une des jumelles mourra parce que leur mère aura voulu immortaliser leur bonheur et prendre les filles en photo. De nouveau, le monde de Lili s'effondre, mais jamais Lili, elle, ne s'effondrera. 

"J'aspirais à une tranquillité, elle, à une existence plus bohème. La vie de couple ne lui convenait plus. Nous avons pensé qu'un enfant nous rapprocherait. C'est le contraire qui s'est produit. Aucun amour maternel ne lui est venu, plutôt, comment dire ?... une répulsion maternelle... - Une répulsion! " Ce mot, dans sa violence, la consterne.
De la répugnance, voilà donc tout ce qu'elle a su inspirer à sa mère, d'entrée de jeu. Ce n'est plus une sensation de nausée qu'elle éprouve à cette table délicatement dressée, avec sa nappe blanche, sa vaisselle raffinée et son bouquet de fleurs, mais une brûlure intérieure ; le mot "répulsion" lui fait l'effet d'une coulée d'acide dans l’œsophage.

Quarante-neuf tableaux pour finalement dépeindre la vie de Lili qui n'est qu’alternance de bonheurs et de tragédies, de questionnements, de quêtes d'amour, le tout magnifiquement ciselé sous la plume délicate, à la fois profonde et légère de Sylvie Germain. 
Petites scènes capitales n'est ni vraiment triste, ni vraiment gai, c'est tout simplement beau. Du grand art !

Bonne lecture & encore merci au Livre de Poche !



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